Culture G.

Philomena ou les conséquences du péché de la chair

Philomena, affiche promotionnelle du film
Philomena, affiche promotionnelle

Avez-vous grandi dans une famille catholique? Moi oui.Mais heureusement, dans les années 80, pas entre 1940 et 1960! Mes enseignants étaient laïques, pas religieux. Lors de la Révolution tranquille, les Québécois ont largement déserté les églises et les dogmes de la religion qui les oppressaient. N’allez pas croire que mon propos aujourd’hui est le rapport Parent paru en 1964 sur la création du Ministère de l’éducation. Non, je veux vous encourager à voir un film racontant une histoire basée sur des faits vécus, s’étant déroulés dans une Irlande catholique, qui aurait pu être dans un Québec tout aussi noyé dans l’eau bénite.

Philomena

Philomena raconte l’histoire d’une dame, interprétée par Judi Dench, qui décide de chercher son fils, vendu en adoption en 1955. Elle a accouché de ce garçon en 1952 et c’est 50 ans plus tard qu’elle entreprend sérieusement des démarches, avec l’aide d’un journaliste. Les filles-mères, ces jeunes femmes qui donnaient naissance sans être mariées, étaient forcées de laisser leur bébé ou leur bambin en adoption. Son cas n’est pas exceptionnel et son garçon lui est arraché physiquement, mais pas mentalement, puisqu’elle y pense tous les jours.

Le film se déroule en Irlande et à Washington. Les paysages sont splendides, les dialogues sont magnifiques, teintés d’humour anglais (j’ai vu le film en version originale) et sans langueur. L’histoire est racontée en à peine plus d’une heure trente et elle vaut plus que des dizaines de comédies romantiques insignifiantes (du genre The Ugly Thruth. Avez-vous ça? Non? Alors n’y songez même pas!). Mais je diverge.

 

Nestor et les oubliés

En regardant le film Philomena (en nomination aux Oscars pour le meilleur film, la meilleure actrice et le meilleur scénario adapté), un documentaire m’est revenu en mémoire. Il s’agit de « Nestor et les oubliés » réalisé par Benoit Pilon (sans lien de parenté avec moi!) en 2006. Ce documentaire trace le portrait de Louis-Joseph Hébert, alias Nestor, qui a grandi à l’orphelinat agricole d’Huberdeau.

« Au début des années 90, les orphelins d’Huberdeau associent leur cause à celle des orphelins de Duplessis, ceux qui ont été internés illégalement dans des hôpitaux psychiatriques. Ensemble, ils essaient sans succès d’intenter un recours collectif […] en l’an 2000, Bernard Landry crée un fonds d’indemnisation de 37 millions de dollars. Le hic, c’est que l’indemnisation n’est offerte qu’aux orphelins qui ont été internés dans des institutions psychiatriques. Huberdeau, orphelinat agricole, est donc exclu. »
Site web de l’émission Zone Libre sur Ici Radio-Canada

Dans ce documentaire, on donne la parole à certaines mères. Plusieurs de ces femmes sont encore aujourd’hui parmi nous; elles sont nées entre 1925 et 1945 approximativement. L’une mentionne qu’elle frottait son ventre rond en souhaitant que son bébé ne naisse pas, puisqu’elle savait qu’elle devrait le donner en adoption. Une autre – et c’est celle qui m’a le plus marquée – raconte les propos de jeunes gens, membres de sa famille, (peut-être) nés vers la fin des années 70. Ils lui disent et ce, sur un ton désinvolte voire naïf: « Ben voyons matante, on n’est pas obligé d’être marié pour avoir un bébé!?!? ».

Non, effectivement, plus maintenant. Toutefois, soyons conscients des milliers de Philomena à qui on a enlevé l’enfant – menaçant et déshonorant – parce qu’elles ne portaient pas la bague au doigt. Nos propos peuvent être blessants, puisque qu’en moins de 50 ans, elles sont passées d’un côté à l’autre du spectre.

 

Ce qu’en disent les critiques