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Faut-il souffrir pour être belle? Nos cibles de torture d’hier et d’aujourd’hui

Andreas Sjödin pour H&M
Credit Photo – Andreas Sjödin pour H&M

La femme a de tout temps souhaiter être désirable aux yeux des hommes. Si tel n’était pas le cas, nous ne nous serions jamais imposées autant de souffrances au nom de la beauté. L’adage « il faut souffrir pour être belle » a ses raisons d’exister. Dans toutes les cultures, il y a toujours une partie du corps qui est plus sublimée que les autres, qui fait l’objet de fantasmes. Dans la Chine impériale, c’était les pieds, au Moyen-Orient, la chevelure, en Occident (XIXe siècle) la taille et ainsi de suite.

Cible de torture n 1 : les pieds

Technique d’hier : les bandages

Les empereurs aimaient les petits pieds. La perfection mesurait 15 cm. Les courtisanes se bandaient les pieds très serrés pour atteindre cet idéal. La Chine étant très conformiste, cette pratique s’est rapidement étendue à tous le pays et les mères de toutes les classes imposaient à leurs filles ce supplice dès l’âge de 4 ans pour leur donner une chance de faire un bon (et riche) mariage. Aujourd’hui, cette pratique est bannie mais elle a survécu pendant plusieurs siècle. Je n’ose imaginer la douleur ressentie tout au long du processus où les pieds s’atrophiaient. Leur démarche ne pouvait être que lente et ardue.

Technique d’aujourd’hui : les chaussures

Bouts pointus qui compriment les orteils, talons à la hauteur vertigineuse qui nous obligent à des efforts impressionnants pour maintenir notre verticalité et j’en passe! Bref, vous me comprenez, nous avons tendance à acheter de véritables petits bijoux destinés à rester sur des tablettes tellement elles sont inconfortables! Savoir bien choisir une chaussure est un art. On a quand même de la chance, Tina Karr nous l’explique dans un livre.

Photo: renaudroussel.com
Photo: renaudroussel.com

Cible de torture n 2 : la taille

Technique d’hier : les corsets

Les corsets eurent beaucoup de succès auprès des femmes au XVIe  jusqu’au début du XXe siècle. Et pourtant, cela n’avait rien de plaisant puisque la pièce était particulièrement rigide. Nous sommes loin des corsets actuels. Même si les objectifs de l’époque étaient les mêmes qu’aujourd’hui (maintenir la poitrine et affiner la taille), nous n’aurions pas cette pratique aujourd’hui. Les corsets de l’époque (faits avec des matériaux sans souplesse) comprimaient les organes internes, réduisant la capacité pulmonaire et stomacale. L’atrophie des muscles dorsaux et abdominaux était également à craindre pour celles qui le portaient de façon régulière pendant des années. On comprend pourquoi ces dames s’évanouissaient à tout bout de champ!

Technique d’aujourd’hui : des gaines jusqu’à l’anorexie

J’admets que le résultat n’est pas le même bien qu’on ait envie de le croire. La gaine peut être inconfortable et pourrait se voir à travers certains vêtements (tout est une question de matière) mais au pire des cas, ce n’est que votre ego qui en souffrira. Par contre, le XX1e siècle a ét sous le signe du culte de la minceur : les régimes sont devenus une mode : il y a la méthode Miami, Dukan, Montignac, Weight watchers, Jenny Craig, hyper-protéiné,faible en gras, faible en glucides, etc. Bref, on ne cesse d’être obsédée par son poids et de jouer au yoyo avec notre estime personnelle. Pas vraiment bon pour le moral.  Il y a aussi le lippomassage. Ça, ça fait mal et, pour l’avoir essayé, je me suis fait brûler! Donc il faut en plus faire attention à bien choisir le professionnel qui utilise la machine. Parfois, on va bien plus loin que le régime et le lippomassage. Selon les statistiques québécoises, 3% des filles âgées de 15 à 25 ans souffrent de troubles alimentaires. Environ 90% des personnes atteintes d’anorexie ou de boulimie sont des femmes. Surprises ? Tout ça pour atteindre des standards de beauté irréalistes. Heureusement, il y a des initiatives comme celle de l’organisme ÉquiLibre dont j’ai parlé dans cet article.

Cible de torture n 3 : les poils

Technique d’hier : la cire orientale

Certes, nous ne sommes pas au même niveau que les instruments précédents ( qui Dieu merci, sont dévolus sous leur forme passé) mais quand même! Une légende raconte que le Roi Salomon aurait convié la Reine de Saba pour vérifier une rumeur voulant que cette dernière soit très poilue. Il aurait fait placer un plancher en miroirs pour en avoir le cœur net. La Reine, en marchant sur les miroirs qu’elle aurait confondu avec de l’eau, releva sa robe, confirmant ainsi la rumeur.  À cette découverte, le Roi se serait exclamé : « Le poil est l’ornement de l’homme, il défigure la femme ». Cette légende, tirée des interprétations arabes de la rencontre entre Salomon et la Reine de Saba (Bilquis) illustre en fait un aspect culturel : la pilosité est une preuve de masculinité. Il ne sied donc pas à une femme de ne pas s’épiler. Après les croisades, cette pratique s’est rapidement répandue en Europe. La cire orientale est un produit très simple à réaliser (eau, sucre et citron) mais qui nécessite une certaine dextérité si vous ne souhaitez pas que votre séance d’épilation ne devienne un calvaire. Aujourd’hui encore, nous l’endurons (comme nos règles) tous les mois !

Technique d’aujourd’hui : le laser

L’épilation définitive! Ça, c’était une bonne nouvelle. Et pourtant…D’abord, ça fait mal : bikini et là où il y a des os, on le sens passer. D’accord, je suis peut-être un peu douillette mais quand même : on vous brûle les poils et la peau aussi quelque part ! Et puis, ça ne se fait pas en une séance. Au bout d’un an, aucune garantie que ce ne soit complètement fini. Il vous faudra peut-être encore plusieurs séances supplémentaires. Plusieurs d’entre nous évitant de faire le laser dans certaines régions du corps (peu importe la raison) se retrouvent donc à poursuivre l’épilation à la cire ou à la pince à épiler (sourcils) ou une méthode connexe qui n’est pas forcément plus agréable. Je ne parle pas du rasoir car même si ce n’est pas douloureux en soi, la repousse est tellement rapide et forte que je le considère plus comme une façon de se dépanner.

Cible de torture n 4 : la couleur de la peau

Technique d’hier : protection

À l’époque du Colonialisme, il était prestigieux d’avoir le teint pâle. C’était un signe de richesse puisque les classes inférieures travaillant aux champs, voyaient leur peau tannée par le soleil. Les femmes se couvraient donc d’un chapeau, portaient des gants et couvraient tout leur corps pour protéger leur peau des rayons du soleil. Du Maghreb à la Chine, les femmes à la peau claire étaient considérées comme plus désirables et/ou d’un plus haut rang. Par contre, disons que cet accoutrement n’est pas très commode quand on vit dans un pays chaud où les températures peuvent atteindre les 40 degrés en été et où la climatisation n’existait pas encore.

Technique d’aujourd’hui : blanchiment de la peau

Dans plusieurs pays d’Afrique comme le Zaïre notamment, on cherche à se blanchir la peau ou à se dépigmenter la peau si vous préférez. Bien sûr, cette pratique est répandue sur d’autres continents mais là n’est pas le sujet. Le pourquoi de cette action? J’imagine qu’entre l’esclavagisme, le colonialisme et la grande place qu’on les mannequins caucasiennes dans les standards de beauté doit y être pour quelque chose. L’ennui, c’est que les produits utilisés pour cet éclaircissement ou dépigmentation peuvent être toxiques et dangereux pour la santé, notamment quand ils contiennent un fort pourcentage d’hydroquinone et de dérivés de mercure.

01 lima 58104 Les plus belles photos du mannequin Adriana Lima de Victorias Secret

Cible de torture n 5 : l’apparence générale

Technique d’hier : les produits naturels

Bon, auparavant, on pouvait utiliser de la camomille pour des cheveux plus doux, du jus de citron pour les éclaircir et toute sorte de produits  pour souligner la beauté naturelle. Si on devait tricher sur notre silhouette, on utilisait les subterfuges de la mode de l’époque comme les corsets. Quant au maquillage, ça allait de se pincer les joues pour leur donner de la couleur au khôl utilisé au Moyen-Orient et fait maison.

Technique d’aujourd’hui : la chirurgie esthétique

Aujourd’hui, quand on regarde les mannequins photoshopées, il y a de quoi avoir des complexes! On oublie trop souvent que ces filles, aussi belles soient-elles sont malgré tout retouchées (pas toutes avec des politiques zéro retouches comme JACOB mais quand même beaucoup). La chirurgie esthétique est devenue monnaie courante avec la trilogie qui fait foi de religion : beauté, jeunesse, minceur. Tout peut être opérable : de la simple liposuccion à l’implant de mollets en passant par le redrapage ou la nymphoplastie (aussi connue sous le nom de labioplastie). Même notre intimité en écope. La convalescence se fait dans le secret et on fait mine de rien par la suite. Enfin…quand on peut car il y a quand même des ratés!

Je suis sûre que j’ai oublié bien des aspects mais il y a matière à une thèse de doctorat alors soyez indulgents. Que pensez-vous sur le sujet ? Avons-nous tort ou raison de nous imposer tout ça ?

2 thoughts on “Faut-il souffrir pour être belle? Nos cibles de torture d’hier et d’aujourd’hui”

  1. Bonjour,
    Je trouve votre article intéressant, il illustre bien comment les femmes ont de tout temps été oppressées afin d’entrer en conformité avec des fantasmes masculins, qui par définition étaient sans rapport avec la réalité du corps puisque issus de l’imagination.

    Vous demandez si nous autres femmes avons raison de nous imposer tout ça mais on voit bien que toutes les « techniques d’hier » émanent de la volonté d’un homme donc ce ne sont pas les femmes qui ont eu l’idée de se torturer mais bien les hommes, qui se fichaient pas mal du reste des souffrances que leurs fantasmes impliquaient.

    Je pense que rien n’a changé, les femmes s’épilent, font des régimes, etc. pour trouver un bon parti et plus généralement, avoir une bonne position dans la société. C’est plus pervers aujourd’hui parce qu’autrefois, les diverses obligations étaient officielles tandis qu’aujourd’hui, ça passe par la manipulation des médias (on nous fait croire que c’est notre choix et que nous aimons souffrir pour être belle). Quid de l’indépendance des femmes officiellement acquise ?

    Pour moi, la réponse est évidente : il faut arrêter le massacre ! Pour cela, il faudrait rejeter tous les messages issus de la publicité et relayés par les magazines féminins, qui nous apprennent à détester notre corps naturel (ses poils, ses capitons, ses défauts à camoufler sous du maquillage alors qu’ils sont parfaitement tolérés sur des hommes, ses rides). Aimons-nous comme nous sommes sans crainte, les hommes ne nous en aimeront pas moins et peut-être même plus.

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