Divers Maman et Bébé

Élever des enfants quand les parents n’ont pas la même religion

Mariage mixité religieuse

Les couples formés d’individus de confessions différentes rencontrent souvent des difficultés bien réelles qui sont reliées à des visions du monde propre à leur religion. L’arrivée d’un enfant dans la famille complexifie habituellement  les difficultés vécues. Si les difficultés prennent naissance dans la confrontation entre deux visions religieuses, on pourrait être tenté de croire qu’un couple comprenant un croyant et un non croyant, peu importe la religion du parent croyant, apporterait encore plus de soucis. Toutefois, c’est souvent l’inverse.

Prenons l’exemple du mariage d’un catholique avec une personne de confession juive. Cette situation implique des règles de vie différentes. Il suffit de penser au calendrier des fêtes religieuses ou à l’éducation religieuse des enfants à naître. Parfois, ces obligations ne sont pas simplement différentes, mais bien mutuellement exclusives ce qui rend la conciliation compliquée.

Par contre, lorsque l’un des partenaires est non croyant, ne demeure qu’un seul ensemble de règles de vie. Cela ne signifie pas pour autant que chaque parent ne possède pas des valeurs qui lui tiennent à cœur ou de préférences quant à l’éducation des enfants. Par contre, une partie des conflits potentiels n’existe pas, tout simplement. Le couple doit établir, parmi les règles de vie de la religion qui demeure, lesquelles il souhaite enseigner à leur(s) enfant(s), tout en incorporant d’autres éléments provenant de l’identité et des valeurs laïques du deuxième parent.

Dans un couple mixte de ce type, les partenaires croyant et non croyant aboutissent finalement à la conclusion que les croyances (« ce qui est vrai ») sont souvent moins importantes dans la vie de tous les jours que les valeurs communes qu’ils possèdent (« ce qui est bon »). Les parents s’entendent habituellement pour établir que les enfants ne seront pas étiquetés ou appropriés par l’un des deux parents, mais qu’ils seront encouragés à explorer les idées soumises par les deux parents et qu’ils pourront en tirer leurs propres conclusions lorsqu’ils y seront prêts.

Cela ne signifie PAS que les enfants ne doivent pas s’intéresser à la foi et aux cérémonies religieuses à laquelle la famille se livre. Les exclure complètement des expériences religieuses vécues par les parents (et bien souvent la famille élargie) reviendrait autant à brimer leur autonomie, que si le parent pratiquant les avait endoctrinés.  Ne pas les étiqueter signifie simplement ne pas les soumettre au choix d’un certain point de vue sur le monde tant que l’enfant n’est pas encore à même de comprendre ce choix dans son entièreté. Par contre, il est tout à fait possible pour l’enfant d’aller à l’église ou à l’école du dimanche, de lire la Bible ou même de prier, sans pour autant être étiqueté comme Chrétien, Musulman ou Juif. Dans le même esprit, l’enfant demeure libre de questionner les idées religieuses, de débattre avec des amis pratiquants et de lire The God Delusion sans pour autant être étiqueté comme un athée.

Être l’enfant d’un couple dont l’un des parents est croyant et l’autre ne l’est pas est une position propice pour : apprendre les concepts religieux tout en les questionnant, participer aux rituels religieux tout en se questionnant sur leur signification et prier tout en se demandant si ses prières sont entendues.

Les parents non croyants sont habituellement ouverts à cette approche, à moins qu’ils ne soient « antithéistes », c’est-à-dire une personne qui s’oppose à la croyance en Dieu et pour qui toute religion est toxique et indésirable. Toutefois, une récente étude démontre qu’aussi peu que 15 % des athéistes se trouveraient dans cette catégorie. Les autres athées sont plus probablement en mesure d’éduquer leurs enfants de façon productive avec un parent croyant.

De leur côté, les parents religieux seront généralement ouverts à l’idée de laisser l’enfant découvrir à son rythme la religion lorsqu’eux-mêmes ont une approche plus progressiste de leur religion. C’est d’ailleurs le cas dans la plupart des communautés religieuses, même celles plus souvent considérées comme conservatrices.

Par exemple, le judaïsme comprend des communautés orthodoxes et conservatrices, mais les juifs réformistes et reconstructionnistes sont souvent prêts à laisser leurs enfants découvrir leur propre voix. Les musulmans conservateurs préfèrent taqlid (le respect de l’autorité), les musulmans plus modérés préfèrent se référer à leur propre jugement (ijtihad) et encouragent leurs enfants à faire de même.

 

Quelques questions à se poser

Les couples doivent décider le plus tôt possible comment ils considèrent l’éducation religieuse de leur(s) enfants(s), et de tester si ces approches de conciliation leur conviennent…. idéalement avant d’avoir des enfants! Voici quelques questions qui permettent d’entamer la discussion :

  •  Est-ce que l’enfant sera baptisé/confirmé, fera sa barmitzvah ou toute autre initiation au sein d’une communauté religieuse?
  • Est-ce que l’enfant ira à l’école du dimanche, ou suivra une éducation religieuse quelconque?
  • Comment répondre aux questions d’ordre religieux que l’enfant posera, tout en respectant les croyances des deux parents?
  • Est-ce que l’enfant sera ultimement libre de son choix, et est-ce que les deux parents sont prêts à vivre avec le résultat de ce choix?

Il n’existe pas une seule bonne réponse pour n’importe laquelle de ces questions, mais certaines réponses pavent la voie vers une famille unie et respectueuses de la foi de chacun. En parler tôt et fréquemment permet d’assurer que les couples « religieusement mixtes » soient sur la bonne voie.

 

Dale McGowan

 

 DALE McGOWAN, Ph.D., a Harvard Humanist of the Year, offre des ateliers sur le thème de la parentalité et de la laïcité. Directeur exécutif de la Fondation Beyond Belief, il est également l’auteur du livre  In Faith, and In Doubt: How Religious Believers and Non Believers Can Create Strong Marriages and Loving Families.